Pour nos deux ans de mariage, nous décidons de partir une semaine en van à la découverte du Lubéron. L'occasion pour moi de prendre mon vélo et de rouler sur les belles routes de la région. Lorsque je regarde à tout hasard les circuits à faire dans le coin, je tombe à ma grande surprise sur le Mont Ventoux. Ça serait dommage de passer si près de ce géant mythique sans le monter en vélo ! C'est décidé, ce sera le point de départ de notre semaine.
Trois villes de départ sont possibles pour arriver au sommet du Ventoux. Bédouin, Sault et Malaucène. Après quelques recherches, je comprends que les deux versants, depuis Bédouin et Malaucène, sont quasi similaires en terme de kilométrage et dénivelés positifs, environ 1900 mètres de dénivelés positifs sur 23km, mais que le départ par Bédouin est le plus mythique car emprunté beaucoup plus souvent par les coureurs du Tour de France. Je ne grimperais peut-être qu'une seule fois le Mont Ventoux dans ma vie. Quitte à être là je choisis de vivre la montée la plus emblématique. Je partirais depuis Bédouin !
La veille, nous nous arrêtons sur un terrain vague prévu spécifiquement pour les camping-cars après avoir fait quelques courses pour le repas du soir. Notre emplacement me permet d'admirer le sommet du Ventoux.
Après avoir cuisiné un bon repas sur notre petit réchaud de voyage, j'observe le sommet et me prépare mentalement au défi qui m'attend le lendemain puis je vais me coucher assez tôt pour me lever aux aurores.
Je me réveille comme prévu assez tôt avec le sentiment d'être bien reposé. Il faut avouer que j'avais quelques craintes après une nuit en van. Je me lève aux alentours de 5h30 pour prendre le temps de petit-déjeuner tranquillement et de digérer un petit peu avant de me lancer à affronter le monstre qui se dresse devant moi.
Nous sommes à l'ombre, il fait frais, j'hésite sur les vêtements et les gants que je vais mettre. J'ai pû lire que le vent soufflait parfois beaucoup en haut. De ce fait, le ressenti de température entre l'attitude et les fortes rafales pouvait être assez froid. Le Mont Chauve tient son nom des paysages sans arbres proche du sommet. Le port de lunettes est recommandé pour éviter de se retrouver avec du sable plein les yeux. Dans tous les cas je prévois le coupe vent, les gants longs et les lunettes de soleil pour la descente, on verra bien si j'en ai aussi besoin avant. Je pars en manches courtes mais avec des manches amovibles sur les avant bras que je pourrais facilement retirer au besoin.
Je suis prêt, je charge le vélo et remplis les poches de mon maillot cycliste. Je porte le vélo sur une centaine de mètres le temps de sortir du terrain vague, ça serait dommage de crever avant le départ.
J'emprunte une petite route qui rattrape très vite la route principale où je rejoins 3 Allemands, un père et ses deux enfants qui doivent être âgés respectivement de 23 et 25 ans. Ces derniers portent un joli maillot cycliste de l'Alpe d'Huez, ce qui me confirme qu'ils ne sont pas à leur coup d'essai en matière de montée de cols.
Les rayons de soleil matinaux mettent en lumière la grandeur du Mont Ventoux mais aussi les vignes qui se situent au pied de ce dernier. Le paysage magnifique me donne déjà envie de prendre une photo mais je me raisonne en me disant que je viens tout juste de partir et que plus on sera haut plus ça sera beau ! Aussi, je ne souhaite pas perdre mon petit groupe. Finalement j'ai regretté plus tard de ne pas m'être arrêté devant ce paysage car on n'en croisera plus de similaire.
Même si je suis un bon grimpeur, c'est la première fois que je monte un col aussi mythique et je me méfie de la difficulté. Ne souhaitant pas partir trop fougueux, je reste au train. Quelques kilomètres plus loin, leur père leur parle en Allemand et accélère un peu le rythme. Même si je ne parle pas leur langue, je comprends très bien ce qu'ils viennent de se dire. Trouvant le rythme un peu trop lent, je dépasse les deux jeunes et me mets dans la roue du père.
Nous grimpons à un rythme confortable de 10 km/h et mon rythme cardiaque ne s'emballe pas. Je monte relativement facilement dans ces pentes à 9% alors que mon coéquipier semble déjà souffrir en silence. Son souffle devient de plus en plus fort et intense. La montée est encore longue et je préfère tout de même profiter de son rythme afin de rester en sous régime et ainsi garder de l'énergie pour plus tard.
Nous traversons principalement des sous-bois. Les beaux paysages que j'espérais voir sont pour le moment cachés derrière ces grands arbres mais la contrepartie est que la température est de ce fait encore fraîche et que le soleil ne nous tape pas sur la tête.
Nous croisons déjà quelques cyclistes qui redescendent. Ceux-là ont se lever encore plus tôt que moi ! La route est calme et je peux compter les voitures croisées sur les doigts d'une main. Nous avons de la chance, des travaux de rénovation interdisent l'accès au col pour les véhicules motorisés. Vu la popularité du col, ce ne doit pas être la même quiétude d'habitude.
À ma grande surprise, nous arrivons très vite au chalet Reynard, qui semble fermé lui aussi en raison des travaux. De toute façon je ne comptais pas spécialement m'arrêter et ma réserve d'eau est encore pleine. À partir de là, les arbres se font de plus en plus rares et laissent enfin percevoir le paysage. J'ai donc décidé de faire quelques arrêts photos même si, à mon grand regret, je laisse filer mon compagnon de route filer.
Un peu plus haut, un photographe professionnel s'est installé et me prend en photo. Génial ! Si j'avais sû je ne me serais pas arrêté faire les quelques photos avec retardateur qui ne sont finalement pas super réussies. Je mettrais plusieurs jours à retrouver la trace de cette photo, à cause d'un mauvais référencement du site du photographe. Il m'a crié son adresse lorsque je suis passé mais je l'ai mal comprise sur le coup. Je me rendrais compte les jours après que la photo Ventoux est un vrai business ! Plusieurs photographes semblent se partager le sommet.
Je ne m'arrête plus jusqu'au sommet et son antenne mythique.
Je rattrape et double quelques cyclistes m'ayant dépassé lorsque j'étais à l'arrêt. L'antenne se rapproche et je me rends compte que je me suis bien réservé. Je suis monté en sous régime tout le long pour éviter le coup dur et je ne suis même pas fatigué. La prochaine fois j'aurais un point de repère et je saurais que je peux monter sans problèmes un grand col à plus de 10 km/h.
Après une petite pause au sommet le temps de prendre une photo avec le panneau du col, je redescends par l'autre versant qui rejoint Malaucène où un autre photographe me prend en photo.
Le plus dur est fait. Mon itinéraire s'arrêtera aux gorges de Toulourenc où j'attendrai un petit quart d'heure que Noushka me rejoigne pour le reste de l'après-midi. Elle ne s'attendait pas à ce que j'arrive si vite à destination.